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Arminae

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Race: Sauvagier

Genre: Féminin

Statut: Décédée

La légende d’Arminae et de Lug.

 

Arminae, le cœur meurtri par le sort que subissait son peuple face aux Alésiens, marcha jusqu’à une rivière. L’eau était pure et fraiche, et l’air tout autour était revigorant. Les quelques rayons de soleil réchauffèrent un peu son âme, mais son cœur était déchiré. Elle s’agenouilla au bord de l’eau et laissa couler ses larmes. Dans son esprit, les questions étaient nombreuses mais par-dessus tout elle ne supportait pas de voir ses frères ainsi martelés par ces bêtes assoiffées de guerre de l’Empire. Tant de vies perdues à cause de la peur et de la stupidité. Tant de sang versé pour satisfaire des monstres qui n’ont cure des tribus de ses semblables. C’en était trop pour elle.

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Non loin de là, caché par l’ombre d’un grand chêne, un ours s’abreuvait paisiblement. Il avait vu la femme, mais très clairement, il n’avait pas envie de changer ses habitudes pour elle. D’où il était, il vit qu’elle pleurait. Mais une mortelle, selon lui, pleure souvent et il n’y avait pas de raison de s’inquiéter. 

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Regardant son reflet, la femme laissa couler ses larmes dans la rivière, laissant le sel et l’amertume se mélanger à l’eau claire. Dans ses pleurs, elle y laissa sa haine et sa colère, ainsi que le désespoir de voir mourir ses frères sous les lames acérées des soldats impériaux.

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On ne sait par quel magie mais le gout de l’eau changea. L’ours qui buvait le sentit aussitôt. En plus du goût salé qu’avait pris sa boisson, il y sentit les sentiments de la femme. En plus de sa colère, elle y avait laissé sa force et son courage. Et l’ours fut intrigué. Comment un si petit tas de chair peut-il dégager autant de puissance dans simplement quelques larmes.

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Quittant sa cachette, l’ours s’avança vers la femme. Elle le vit, il en était certain, mais ne bougea pas. Et lentement, il s’approcha. Ce ne fut que lorsqu’il fut à sa hauteur qu’elle tourna la tête. Il ne l’avait pas remarqué mais elle était d’une très grande beauté.

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  • « Je te salue humblement, Lug, Seigneur ! » Lui dit-elle de sa voix douce et cristalline.

L’ours s’immobilisa. Dans sa tête, la voix de la femme se mit à résonner. Son cœur s’accéléra et ses pensées se brouillèrent l’espace d’un instant. Elle semblait si douce et si fragile mais son aura dégageait une telle puissance et une telle volonté ! Pourquoi diable son cœur s’emballait-il ainsi à la vue d’un être mortel et inférieur ? Il ne comprenait pas.

La bête se ressaisit et alla s’allonger à côté de la femme, sans la quitter des yeux. Il se sentait bien à ses côtés et ce sentiment semblait être partagé car elle sécha ses larmes et lui adressa un sourire. Alors Lug vit qu’il serait bon de l’aider. Bien qui ne regrettait rien, il ne compris pas pourquoi mais cela lui semblait évident. Il pris alors sa forme humaine sous les yeux de la femme, et assis dans l’herbe, le long de cette rivière, Lug s’apprêtait à changer la face du monde.

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  • « Ainsi, tu m’as reconnu ? » Interrogea-t-il.

  • « De toute la forêt, Seigneur, aucun ours n’a votre taille. » Lui répondit-elle.

  • « Penses-tu que je devrais changer mon apparence animale par un ours plus petit ? » Questionna-t-il encore.

  • « Oh non ! Seigneur ! Il vous est nécessaire d’être reconnu ! » Lui affirma-t-elle, un peu étonnée. Lug éclata de rire et Arminae rougit un peu. La réponse qu’elle lui donna lui semblait à la fois drôle et évidente.

 

  • « Que t’arrive-t-il donc pour que tes larmes soient si amère ? » Lui demanda-t-il sans détour. Arminae commença le récit de la guerre et les atrocités perpétrées par les soldats de l’empire alésien. Elle lui fit part de ses inquiétudes et des problèmes que les tribus avaient à s’unifier. Alors Lug lui fit une proposition.

 

  • « Je peux t’aider, jeune Arminae, si tu prouves que tu en es digne. Je vais laisser mon esprit animal se libérer et si tu arrives à le dompter sans artifices, je t’aiderais à unifier les tribus, je détruirais tes ennemis et te mènerais vers ta liberté. »

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Arminae accepta le défi et Lug reprit sa forme animale. S’ensuivit un combat long et éreintant entre un ours et une femme. Des arbres furent brisés, des rochers fracassés et la forêt résonna du tumulte d’une lutte épique qui dura plusieurs heures, mais l’ours fut dompté.

Arminae était exténuée. Elle s’allongea sur la rive et l’ours vint s’allonger à côté d’elle. D’un geste tendre, elle posa la main sur la tête de la bête et lui murmura au creux de son oreille : « Merci, Seigneur. » avant de s’endormir contre le flanc de l’animal.

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Le lendemain matin, Arminae et Lug prirent la route pour commencer l’unification du peuple sauvagier.

Les chefs des tribus virent arriver un messager portant une invitation à un banquet. Une certaine Arminae les convoquait, affirmant que leur liberté était proche. Beaucoup d’entre eux crièrent au scandale mais la curiosité fut plus forte et ils prirent la route.

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Le banquet fut magnifique, les mets délicieux. Tout se passait bien jusqu’à ce qu’Arminae prit la parole. D’une voix forte, elle demanda à tous les chefs de s’unifier, affirmant avoir un allié puissant à ses côtés. Elle fut brimée et raillée, certains la traitèrent de folle et d’autres firent mine de s’en aller jusqu’au moment où, dans la forêt derrière elle, une bête cria. Un grondement assourdissant qui perce l’âme et fait plier le genou empli l’air puis, faisant vibrer le sol de son pas lourd, la bête immense sortit de sa cachette pour se montrer au peuple sauvagier.

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Arminae, dégageant une force jusqu’ici inconnue, parla à nouveaux, exhortant les chefs des tribus à s’agenouiller devant elle pour le bien des sauvagiers ou de se préparer à connaître le courroux de leur dieu. Alors que la plupart des chefs posèrent le genou au sol, cinq d’entre eux mirent en doute la parole d’Arminae. Elle n’eut pas le temps d’essayer de les convaincre. Lug traversa la foule et, d’un seul coup de patte, arracha la tête des opposants de sa protégée avant de se jeter sur les corps sans vie et de les dévorer sous les yeux médusés des autres chefs. Le ton était donné et un retour en arrière était maintenant impossible. Il lui fallait maintenant leur dire pourquoi ils étaient tous là : La vengeance et la liberté des peuples de Féralis.

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Les tribus se rassemblèrent autour de celle qu’ils appelaient Brennae et sous l’impulsion d’Arminae formèrent une armée soudée et forte qui se mit à marcher contre les forces des alésiens. Les batailles furent sanglantes et bientôt, la femme et son ours furent reconnus par les stratèges de l’empire comme la plus grande menace de leur temps. Les envahisseurs furent repoussés de bataille et bataille avec pour seules options la retraite ou la mort.

Mais Amaram IV, l’empereur, ne voyait pas la chose de la même manière. Refusant de perdre le contrôle des terres qu’il avait envahies, il dépêcha ses meilleurs régiments pour mater cette rébellion. Des centaines de soldats partirent mais aucun d’eux ne revit sa famille. Furieux, Amaram prit lui-même la tête d’une armée et partit en campagne contre ceux qu’il nommait barbares. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’il se rendit compte que plus aucune tribu ne se soumettait et que son autorité avait été remplacée par celle d’une Brennae. La colère le submergea et il prit la route vers les troupes d’Arminae sans attendre.

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C’est dans les montagnes, au centre de Féralis, que les deux armées se firent face. Amaram la vit, là, avec son ours, le défiant par son existence. Il chargea, suivit de ses hommes et la pierre se rougit du sang des soldats. Arminae l’attendait, impatiente de mettre fin à cette guerre et à l’oppression des alésiens sur son peuple. Le combat s’engagea, les lames taillèrent la chair et de coups en parade, d’esquives en charges, Arminae prit le dessus sur Amaram. Il frappa en visant le cœur, la blessant gravement, mais la lame d’Arminae s’enfonça dans le cou de son ennemi, l’assurant d’une victoire, même si elle n’était pas immédiate.

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Leurs deux corps tombèrent mais fendant les troupes, un ours gigantesque traversa le champ de bataille, arrachant au passage quelques têtes, et vint amortir la chute de la femme. Le cri de l’ours qui suivit changea l’air en peur et les soldats alésiens en furent paralysés de terreur. Ce fut un massacre et encore aujourd’hui peut d’histoire alésiennes en parlent.

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Allongée sur le dos de la bête, Arminae se laissait bercer par sa démarche. Tendrement, elle lui caressait l’encolure pendant qu’il l’emmenait loin du tumulte des combats. Elle voyait son propre sang tâcher la fourrure de cet être qui l’avait tellement aidé et ne put s’empêcher de laisser couler une larme. Ses pensées allaient vers lui qui s’était montré si bon pour elle, la brennae qui aimait si profondément l’ours et l’homme qu’il était. Et alors que la vie allait la quitter, il était là à essayer de la sauver alors qu’il lui était tellement supérieur. Elle ferma les yeux et se laissa gagner par ce sommeil si réconfortant.

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                Lorsqu’elle ouvrit les yeux, des sages et des médecins s’afféraient autour d’elle, sursautant aux grondements de l’ours contre le flanc duquel elle  était allongée. Ses blessures avaient été pansées et les onguents semblaient faire leur effet, du moins pour un temps. Son corps était douloureux mais malgré tout, elle essaya de se lever jusqu’à ce qu’une grosse patte vint la forcer à se recoucher avec douceur. Elle bénéficia de nombreuses attentions et de tous les soins connus de ses pairs mais si les entailles de ses membres guérissaient, la blessure la plus importante s’infectait sans cesse. Même Lug, qui reprenait forme humaine lorsqu’ils étaient seuls, ne pouvait rien faire.

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                Arminae, belle et forte, était aussi bien loin d’être stupide. Sentant qu’un dénouement peu favorable pour elle arrivait, elle fit convoquer les sages du peuple sauvagiers et leur donna pour mission qu’après son départ vers un autre monde, ils devraient veiller à ce que les tribus restent unies devant l’ennemi. Elle les nomma alors l’Ordre des Chamans, Gardiens de l’unité. En tant que Brennae, ce fut son dernier édit. Très peu de temps après, un messager vint lui annoncer que l’empire alésien périclitait suite à la mort de son empereur. Une grande fête fut organisée. Ce fut la dernière fois que la Brennae prit la parole devant son peuple. Son message, empli d’espoir et de sagesse changea la mentalité des tribus pour un Feralis libre.

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                L’an 534FA venait de commencer lorsque les sages et les médecins cessèrent d’essayer de nouveaux remèdes sur la blessure d’Arminae. Leur impuissance les attrista mais la Brennae les rassura et les félicita pour ce qu’ils avaient accompli. Elle savait que la fin était inéluctable et qu’elle n’avait pas peur de mourir. Lug, toujours allongé à côté d’elle, sous sa forme d’ours, la regarda et acquiesça de la tête. Lug la pris sur son dos et ils partirent tous les deux vers la rivière où ils s’étaient rencontré. Personne ne sut jamais ce qu’ils y firent, mais Arminae souriait lorsqu’ils revinrent au petit matin. Ils se dirigèrent vers la bordure de la forêt où les sages avaient préparé une couche de paille et de peau. Lug la laissa glisser doucement sur le sol et elle s’allongea sur le lit préparer pour elle. L’ours approcha sa tête près de celle d’Arminae, elle posa tendrement sa main sur l’encolure de la bête et dans un dernier murmure, elle dit : « A jamais dans mon cœur, Seigneur ? »

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                Lorsque la main d’Arminae tomba le long de son corps, Lug poussa un cri qui déchira le silence du monde et tous surent qu’Arminae, la première Brennae des sauvagiers venait de quitter le monde des vivants. L’ours souffla sur le corps sans vie puis se dirigea vers la forêt. Certains disent qu’ils ont vu l’ours pleurer mais tous affirment qu’une silhouette bleutée et fantomatique l’accompagnait. On ne revit plus Lug depuis ce jour.

 

                Les tribus, sans chef, se séparèrent à nouveau. Et même si des conflits éclataient de temps en temps, le peuple sauvagier s’unissait sous l’égide de l’Ordre des Chamans pour faire face à l’ennemi qui voulait prendre leur liberté. Parmi eux, certains espèrent comme d’autres craignent qu’un jour, une jeune fille éplorée ne se rende sur les rives d’une rivière et y rencontre un ours en train de s’abreuver, et il n’est pas rare de voir les jeunes filles des tribus sauvagier se rendre à la rivière pour exprimer leur chargrin.

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